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Les Voivres
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La "Bataille" des Voivres : 18 juin 1940

17 juin 2015 Par jeannot88 1 réaction
La "Bataille" des Voivres
C’est à la lecture de cet article, découvert dans un blog du " net " : http://atf40.forumculture.net/t3994-11e-raclh (*) que s’est, en mars dernier, rapidement imposée dans mon esprit, l’idée de tenter de reconstituer les événements survenus le 18 juin 1940 à Les Voivres.
(*) : lien mort, note J N du 30-10-2021.
► « La défense de Voivres (Vosges) par les Bigors du 11ème RALC (10ème Batterie) le 18 juin 1940 :
Le jour, il fallait tirer et l'on roulait la nuit : des combats sans trêve ni cesse, la retraite sans sommeil ni repos. En huit jours, au pas lent des dix chevaux d'attelage, sous les bombes et le canon, la 10ème batterie du 11ème RALC vient, par delà les plaines de Champagne et les coteaux du Barrois, de haler ses lourdes pièces de 155 L des collines boisées d'Argonne jusqu'aux premières pentes des Vosges.
Le 18 juin, au matin, on est à Voivres, un petit village vosgien dont l'unique rue, le long de la route, s'étire vers le sud entre un gros boqueteau qui la domine d'un côté et une mince languette de bois de l'autre. Partout on signale des engins blindés ennemis qui sillonnent routes et chemins, encerclent et submergent les derniers îlots de résistance. Plus au nord, le 11ème RALC, après avoir rebroussé chemin, cherche une fois ultime à se dégager encore et à prendre le large. Mais il est seul, sans soutien d'infanterie ; il faut que l'on protège sa retraite. C'est la mission qui va être confiée à la 10ème Batterie, qui devra au besoin se sacrifier entièrement.
Cette 10ème Batterie, c'est le capitaine Couesdic (*) qui la commande, un Saint-Cyrien de 28 ans, ardent, colonial dans l'âme. Les moyens dont il dispose encore ? Deux pièces de 155 L sans munitions, quelques voitures, quatre armes automatiques, une quarantaine de fusils. Avec cela, il pense qu'il va pouvoir tenir deux heures. Il en a rendu compte au chef d'escadron, puis, bref, a donné ses ordres : les deux pièces seront mises en travers de la rue à la sortie sud du village, devant laquelle, solidement brêlées, elles feront un excellent barrage. Le sous-lieutenant Bapst, avec vingt canonniers et deux fusils-mitrailleurs, assurera la défense rapprochée du barrage et du bois de l'ouest. L'aspirant Dumortier, avec quinze canonniers et une mitrailleuse, défendra le boqueteau. L'adjudant-chef Montfort, en réserve de batterie avec dix hommes et une mitrailleuse, surveillera les lisières ouest du village. Consigne pour tous : ne tirer qu'à coup sûr et tenir jusqu'au bout.
En quelques instants, tout le monde est en place. Il est 09 h 30, soudain, un bruit de moteur, des rafales de mitrailleuses. Prudemment, un engin ennemi approche, puis s'arrête à 30 mètres du barrage. Sa tourelle pivote en tous sens, ses balles fouillent les couverts. Silencieux, les canonniers du 11 se terrent et ne répondent point. Le capot du blindé se soulève, une tête apparaît. Aussitôt quatre coups de feu claquent. Précipitamment le capot se referme et l'automitrailleuse disparaît. Mais d'autres surgissent presque aussitôt. Des motocyclistes foncent sur le barrage. Avec des balles perforantes, les canonniers du 11 cherchent à toucher les parties faibles des blindages ou les visières. Les premiers motocyclistes sont abattus au fusil.
Maintenant, le combat fait rage. Les canons des blindés mêlent leurs coups sourds au crépitement de la fusillade. La route est couverte d'engins. Quelques-uns cherchent à gagner du terrain à travers champs, d'autres à bousculer le barrage. Mais partout les défenseurs font tête.
A 10 h 00, un ordre de repli arrive : le régiment se dirige vers Remiremont. Mais l'on ne peut songer pour l'instant à esquisser un mouvement quelconque de retraite : la 10ème est durement accrochée et il faudrait laisser trop d'hommes sur le terrain. Donc le combat continue.
L'ennemi se fait plus mordant. Soudain, parmi les nôtres, une mitrailleuse s'arrête, puis repart : servant blessés. Sous un pommier, un fusil-mitrailleur se tait : trois servants viennent d'être successivement tués. Mais, bondissant de couvert en couvert, le petit groupe de réserve de l'adjudant-chef Montfort prend leur place et "bouche le trou".
Il est 11 h 00. De notre côté, la fusillade devient moins nourrie. Il y a des morts, des blessés. Et puis les munitions commencent à manquer. Un nouvel ordre vient de parvenir du commandant de groupe : se replier en direction d'Epinal !
Ordre immédiat du capitaine : les groupes Bapst et Dumortier se replieront à son signal, tandis que le groupe Montfort, ramené en arrière, s'installera à la sortie nord du village, derrière une crête, et protégera le repli de la batterie.
Mais, soudain, des rafales toutes proches déchirent l'air. Chars, automitrailleuses, motocyclistes surgissent sur la route. Les brancardiers sont enlevés. Le capitaine Couesdic, couché dans un fossé de la route, essuie à bout portant une rafale de mitrailleuse, est entouré, désarmé et fait prisonnier. Par le barrage disloqué, l'ennemi se rue dans le village qu'il submerge. L'adjudant-chef Montfort, qui, resté en arrière, cherche à sauver les papiers de la batterie, est abattu sur place.
Cette fois, c'est la fin : les forces en présence sont trop disproportionnées. Plusieurs centaines de chars, d'automitrailleuses, de motocyclistes défilent dans le village. Le sous-lieutenant Bapst lui aussi vient d'être pris. Sur quarante-cinq canonniers, six sont tués, quatre blessés. Successivement les débris épars de la 10ème batterie succombent. Mais deux heures durant, seule et sans soutien, gardant intactes et pleines les traditions de l'arme, celle-ci a réussi à maintenir en échec des effectifs considérables et puissamment armés. Les cadets de demain garderont vivant le souvenir de ce que furent, à Voivres, les artilleurs de la 10ème batterie. »
(*) Nous verrons que le nom du capitaine Couëtdic sera écrit de différentes façons. Celle-ci semble la bonne.
Depuis, tout (ou à peu près) ayant été écrit - mais les témoignages restent au demeurant peu nombreux -, je vais donc me contenter, après avoir rappelé des liens relatifs à cet épisode, préciser qu’il est intéressant de comparer les différents récits du combat, rapportés tant dans le blog d’ATF40 que dans le témoignage de Pierre Broggini, complété par des éléments fournis par Bernard Munier et le lieutenant-colonel Gagnaire, et enfin celui du capitaine Couëtdic, acteur "privilégié" des événements,
* http://lesvoivres88240.over-blog.com/2015/03/combats-du-18-juin-1940-a-les-voivres.html
* http://lesvoivres88240.over-blog.com/2015/05/combats-du-18-juin-1940-a-les-voivres.html
* http://lesvoivres88240.over-blog.com/2015/05/bonjour-je-suis-le-lieutenant-colonel-loic-gagnaire-du-11eme-regiment-d-artillerie-de-marine-de-saint-aubin-du-cormier-en-ille-et-vi
* http://lesvoivres88240.over-blog.com/2015/05/combats-du-18-juin-1940-a-les-voivres-7.html
* http://lesvoivres88240.over-blog.com/2015/05/les-combats-dans-les-vosges-pendant-les-deux-guerres.html
et de faire plusieurs remarques concernant ces événements.
► - Une seule ou deux pièces ? Selon Pierre Broggini : « Quant au canon, je l'ai observé à souhait jusqu'au moment où des soldats allemands l'ont déplacé à la force des bras et je dirai que la bouche a provoqué un impact dans la façade de la maison de Joseph Morel car il a pris un peu de vitesse lorsqu'il a été positionné en travers de la route. Ce canon, peut-être du 155 mm, avait été judicieusement placé pour prendre en enfilade la route de Bains les Bains. C'est une route rectiligne sur environ 400 mètres, bordée de part et d'autres de maisons d'habitation. Les artilleurs avaient-ils dessein de tirer sur l'ennemi à tir tendu ? Il n'y a pas de réponses. Selon un voisin, Paul Morel, les munitions n'ont pas été acheminées avec la pièce. »
Selon ATF 40 « les deux pièces seront mises en travers de la rue à la sortie sud du village, devant laquelle, solidement brêlées, elles feront un excellent barrage ».
Tous les témoignages confirment toutefois qu’il n’y plus de munitions d’artillerie. Il en découle que la ou les pièces avaient été positionnées en barrage sans aucune possibilité de tir en enfilade.
- Motocyclistes allemands abattus ou non : pas vraiment de témoignage confirmé.
- Si les moyens allemands sont importants, ils me semblent quelque peu surestimés : « Plusieurs centaines de chars, d'automitrailleuses, de motocyclistes défilent dans le village » ... par rapport aux 8 ou 9 automitrailleuses régulièrement citées.
- En dehors des papiers de la batterie que l’adjudant-chef Monfort cherche à sauver, il n’est, en revanche, jamais question, hormis la supposition du lieutenant-colonel Gagnaire : « Couëtdic a fait détruire ses archives derrière la barricade mais il aurait (au conditionnel) caché son fanion sur place. », d’un quelconque fanion.
- Morts et blessés : les témoignages divergent quelque peu. 6 tués et 4 blessés selon ATF40, également 6 tués et 4 blessés selon Couëtdic, 6 tués et 3 blessés selon le livre de Roger Bruge, 8 morts au moins selon le lieutenant-colonel Gagnaire (5 à Les Voivres + 3 des suites de leurs blessures (1 à Bains les Bains, 1 à Golbey, non spécifié pour le troisième).
Pour résumer : Tués adjudant-chef Monfort, Boutin, Farard, Toullec, Rakotojonina, Ferrand (décédé suite à ses blessures au PS [poste de secours] de Bains les Bains). Blessés : Duchesne, Gromy, Priol. Boutigny et Lohard seraient décédés plus tard.
► Nous y voici. En ce 18 juin 2015 (9 h 30), à l'heure même où la 10ème batterie s'apprête, 75 ans plus tôt, à affronter l'ennemi, je pense à ces soldats qui vont livrer un combat perdu d'avance, "pour l'honneur". Je suis content que, lorsque Bernard a commencé à songer à ces événements, il ait écrit : « 1940 n'a pas été qu'une immense débandade, un sauve qui peut général de l'armée française. Beaucoup se sont battus et beaucoup sont morts ».
Ce fait d'armes dans notre petit village (que l'on peut multiplier par bien d'autres) démontre clairement que des soldats commandés par quelques chefs valeureux, talentueux ou, en tout cas, ayant foi dans leur métier, sont capables de résister à l'envahisseur, de rivaliser face à des effectifs et des matériels bien plus importants, de donner leur vie - sans doute un peu désespérément - pour leur Patrie.
Non la "débâcle" de 1940 n'est pas seulement le fait de soldats en débandade (100 000 à 110 000 ont été tués), elle est surtout la résultante de (grands, par leur grade) chefs militaires rivaux, incapables et complètement dépassés, et d'un gouvernement imprévoyant, sans volonté, prêt à "se coucher" devant un « petit caporal » autrichien devenu fou.
Oui, la "Bataille des Voivres", a contribué, modestement certes, à sauver l'honneur de l'Armée d'un Pays, malheureusement sur le point de subir le joug nazi pendant près de 5 ans.
jeannot88

L'auteur jeannot88 est l'auteur de ce message sur Les Voivres (Vosges) publié le mercredi 17 juin 2015 à 13h16.

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Les commentaires (1)

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15 juil. 2015 17h04

Je signale un excellent article de Bernard Munier
http://lesvoivres88240.over-blog.com/2015/07/nom-de-code-pluto.html
qui nous cite une anecdote sur Les Voivres mais à l'époque de la Libération.

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